Avec l’âge, je me rends compte que j’aime de plus en plus ces habitudes qui ponctuent le cours du temps en me donnant la
trompeuse impression d’un défilement un peu moins rapide des années.
Depuis près de deux décennies, ce périple bourguignon fait partie des virgules temporelles indispensables à mon
bien-être : ces quelques jours dans le vignoble de la Côte d’Or me permettent d’envisager la fin de mes vacances estivales avec sérénité, gonflé d’une énergie positive nécessaire pour
entamer cette nouvelle année scolaire.
Comme nos deux jeunes membres du club A.O.C. qui nous avaient accompagnés en 2011 étaient retenus en Alsace pour des
raisons familiales ou professionnelles, nous voilà « on the road again » dans notre formation habituelle : en duo avec Martial, l’inventeur du béton au riesling.
Le programme de cette année est assez conséquent : trois étapes traditionnelles – Murat, Carillon et Castagnier – et trois nouvelles adresses – Carré, Rion et Chicotot.
Hoppla c’est parti !
Jour 1. : domaine Denis Carré à Meloisey
J’ai découvert le domaine Denis Carré il y a quelques années (avant que je commence à publier sur le net) et j’ai terminé
récemment la série de vins achetés sur place à l’époque. Issus du difficile millésime 2004, les rouges de ce domaine se sont goûtés à la perfection du début à la fin de leur séjour dans ma
cave…il n’en fallait évidemment pas moins pour que j’aie envie de remonter sur les hauteurs de Beaune pour une nouvelle visite chez cette famille vigneronne de Meloisey.
Nous sommes reçus par Denis Carré qui interrompt ses travaux en cuverie pour nous accompagner dans sa grande cave et nous inviter à déguster la gamme de vins en vente actuellement.
Une partie du vaste chai à barriques du domaine Carré.
Comme la journée est encore très longue nous sélectionnons 8 vins sur les 12 proposés sur le tarif du domaine :
Bourgogne blanc Sous la Velle 2010 : le nez est fin, citronné et beurré, la bouche est
droite mais l’ensemble reste particulièrement élégant.
Récoltés à l’est du village de Meursault, pas très loin du domaine Buisson-Charles d’ailleurs, ces chardonnays ont engendré en vin
très franc et déjà bien gourmand.
Meursault Les Tillets 2010 : le nez est profond et minéral avec des notes de beurre frais
et de zestes d’agrumes, la bouche est ample, grasse et concentrée avec une belle finale minérale.
Cette parcelle située au dessus des Genévriers nous a livré un Meursault bien typé, très minéral mais charmeur, un peu dans
l’esprit du vin précédent mais avec une matière plus dense et plus complexe…belle réussite !
Denis Carré dans sa cave.
Savigny les Beaune Vieilles Vignes 2010 : le nez flatte par son côté immédiat et très
gourmand sur les fruits rouges bien mûrs, la bouche est tout aussi charmeuse avec une structure souple, soyeuse et légère et une finale bien glissante.
Gouleyant et déjà bien expressif ce Savigny est prêt à boire…une vraie friandise !
Saint Romain Le Jarron 2010 : le nez est plus discret avec des notes de sous-bois et de
terre, la bouche plus concentrée confirme son profil très minéral, la finale est solide et longue avec un retour aromatique bien présent.
Après le Savigny très guilleret, vin de fruit par excellence, voici un Saint Romain très sérieux, vin de terroir encore un peu
refermé dans sa gangue minérale. A garder.
Auxey-Duresses 1°Cru Le Bas des Duresses 2009 : le nez est bien épanoui sur les fruits
rouges et le noyau de cerise, la bouche montre une belle plénitude avec une matière gourmande, charnue et une finale solidement tenue.
Le changement de millésime est sensible mais cet Auxey 1°cru s’offre à nous avec harmonie et élégance...voilà une superbe
bouteille avec un beau rapport Q/P (16 euros départ cave).
Beaune 1°Cru Les Tuvilains 2009 : le nez est encore très discret mais la bouche révèle une
matière puissante et concentrée avec une finale qui développe progressivement un joli sillage fruité et vanillé.
Cette cuvée qui m’avait particulièrement séduit sur le millésime 2004 est encore sur la retenue aujourd’hui mais quelle belle
présence en bouche !
A garder quelques années en cave pour lui laisser le temps de révéler ses potentialités…Très prometteur.
Pommard Les Noizons 2009 : au nez le fruité est ouvert et mûr avec quelques notes
minérales et une fine touche beurrée, la bouche puissante et solidement charpentée garde cependant un côté très velouté, la finale se prolonge sur des évocations minérales très nobles.
Issu d’une parcelle située sur les coteaux au dessus des Epenots et des Pézerolles et exposée plein sud, ce Pommard séduit par sa
richesse aromatique et sa belle densité…déjà accessible aujourd’hui, ce vin mérite évidemment quelques années en cave pour se bonifier encore.
Pommard 1°Cru Les Charmots 2009 : le nez s’ouvre sur quelques nuances un peu lactiques,
mais très rapidement les notes de fruits noirs et de pierre chaude remplissent le verre, la bouche est puissante et solidement structurée avec un toucher onctueux et une finale fraîche et
longuement aromatique.
Malgré ce statut de premier cru ce Pommard se montre déjà très accessible dans sa jeunesse…il mériterait un peu de garde pour se
complexifier mais s’offre déjà avec tant de gourmandise que son cas va constituer un crève-cœur pour l’œnophile. MIAM !
Denis Carré a démarré son exploitation viticole en 1975 « avec 3 pièces de Passetougrain », garagiste la nuit et
vigneron le jour, il a monté petit à petit cette exploitation viticole qui a vraiment belle allure aujourd’hui : des installations spacieuses et fonctionnelles et un patrimoine foncier de 13
hectares répartis sur la Côte de Beaune. « Nos parcelles de vigne sont dispersées sur un secteur très large (entre Savigny et Saint Romain) ce qui nous protège un peu des catastrophes
occasionnées par la grêle ».
Martial, son fils de 24 ans qui travaille avec lui depuis quelques années a choisi le travail intégral du sol pour ses
vignes : depuis 3 ans, les rangs sont labourés et les contours sont enherbés pour stabiliser le sol.
En cave les cuvaisons durent entre 12 jours pour les petites appellations et 20 jours pour les 1°Crus et les
pommards ; les élevages se font en barriques durant environ 14 mois. Les cuvées sont oxygénés régulièrement pour leur donner ce côté flatteur et facile à approcher, qui constitue un peu la
signature des vins du domaine.
Malgré sa situation un peu excentrée par rapport aux villages réputés de la Côte de Beaune, le domaine Carré vend 1/3 des
100000 bouteilles produites à une clientèle particulière…un signe qui ne trompe pas !
Les vins du domaine se caractérisent par un charme direct et immédiat qui se manifeste dès le plus jeune âge, mais leurs
cuvées issues de terroirs classés sont taillées pour tenir et se bonifier dans le temps.
Avec des prix relativement sages et une gamme qui couvre quelques appellations prestigieuses de la Côte de Beaune, ce
domaine reste une belle aubaine pour les amateurs de vins de Bourgogne…qu’on se le dise !
En allant vers Puligny, une belle surprise nous attendait en haut des falaises de Saint Romain…une vue exceptionnelle sur le Mont
Blanc.
…si si si c’est bien le Mont Blanc !