En cette période un peu tristounette qui précède les festivités de fin d’année, nos vignerons redoublent d’imagination pour nous offrir la possibilité d’oublier
la grisaille, la froidure et cette frénésie consumériste qui nous attire souvent très loin de l’essentiel…
Vigneron esthète et mélomane, Etienne Sipp a décidé de conjuguer ses deux passions en organisant un concert-dégustation aux chandelles : associer quelques
belles références du domaine avec des morceaux de musique interprétés par l’altiste Anne-Irène Kempf…une fête sensorielle garantie !
Le décor très intimiste
Dans la pénombre de la « Stube » située au premier étage, les chandelles diffusent leurs lueurs vacillantes, le Crémant d’Alsace pétille dans nos
verres et la musicienne est devant son pupitre…c’est parti pour quelques instants de pur bonheur !
Anne-Irène Kempf.
Après une mise en bouche très classique avec l’Allemande de la deuxième Partita BWV 1004 de Jean-Sébastien Bach où nous avons pu apprécier la sonorité chaude et harmonieuse de l’alto, Etienne Sipp nous a servi son Crémant d’Alsace Blanc de Noirs alors qu’Anne-Irène Kempf interprétait Ai Limiti della Notte pour alto seul
de Salvatore Sciarrino :
Un vin splendide issu de raisins très mûrs avec un fruit épanoui et une mousse crémeuse qui a résonné avec les sonorités
extravagantes de cette pièce. Un mariage réussi entre le style festif et virevoltant du crémant et la fantaisie un brin provocatrice de ce morceau de musique.
Le Riesling Grand Cru Kirchberg de Ribeauvillé 2008 a été accompagné par les
Six esquisses pour alto seul de Paul Collin :
Un riesling droit, sérieux, d’une grande noblesse, qui nous accompagne dans l’ambiance profondément méditative de ce morceau de
musique. Un vin et une pièce instrumentale qui nous conduisent au recueillement et à l’introspection…une expérience un peu mystique !
La Fantaisie N°1 TWV 40:14 de Georg-Philipp Telemann nous ramène dans un univers plus
classique en compagnie du Pinot Gris Grand Cru Osterberg 2008 :
Un moment de jovialité simple et immédiate parfaitement illustré par ce vin parfaitement équilibré à la structure bien ronde, qui
se livre à nous avec une belle franchise : un instant béni de légèreté et d’insouciance.
Etienne Sipp présente ses vins
Le Gewurztraminer Grand Cru Osterberg V.T. 2006 et la Suite N°1 en sol mineur
opus 131d de Max Reger ont été choisis comme le dernier couple musico-vinique de cette belle soirée :
Ce vin à qui le botrytis a apporté une richesse aromatique supplémentaire étonne et séduit par son infinie complexité tout à fait
en phase avec les volutes et circonvolutions très recherchées de l’œuvre de Reger : une apothéose sensorielle avec deux œuvres lyriques mais complexes face à face !
Le mot de la fin est laissé à Antonio Vivaldi et sa Sonate en Fa M TV52 pour flûte à bec et basse
continue, où nous avons eu le bonheur d’apprécier le talent de Diane Sipp à la flûte…comme quoi on ne sait pas faire que du vin chez les Sipp, BRAVO !
Pour conclure :
- Penser à associer des vins et des mets est une démarche naturelle, réfléchir à d’éventuelles synergies positives entre
vin et musique est un peu plus rare…saluons avant toutes choses l’initiative d’Etienne Sipp qui nous a permis de réaliser une première expérience sur ce thème.
- Avec des morceaux de musique savamment choisis et brillamment interprétés dans une ambiance sereine et intimiste, les
vins du domaine Sipp ont été servis dans des conditions de dégustation plutôt inhabituelles. Mais goûter des vins comme des œuvres musicales, et vice-versa nous emmène dans un univers sensoriel
insoupçonné…quel beau voyage !
- La mise en scène inhabituelle de cette dégustation m’a soumis à un monde de sensations gustatives et auditives d’une
rare densité : de la musique, des arômes, des goûts, très peu de paroles…une expérience rare !
Vivement la prochaine édition !
Bravo et merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous régaler ce soir.