Face à cette météo d’août aux accents automnaux et à la perspective d’une rentrée des classes qui s’approche à pas de
géant, cette petite virée en terre bourguignonne tombe à pic pour éviter la petite déprime de fin de vacances. Toujours en compagnie de Martial, un collègue que je suis en train de convertir à
ces saines pratiques œnophiliques, nous partons pour 2 jours de visites et de dégustations dans le vignoble de la Côte de Nuits à la Côte Châlonnaise.
Des problèmes d’emploi du temps nous ont contraints de serrer un peu le programme en oubliant le Mâconnais et le
Beaujolais…mais j’ai la ferme intention d’y retourner à la fin de l’automne…Parole d’alsacien !
Jour 2 : grands blancs de la Côte de Beaune et découvertes au pied de la Colline des Cortons.
Domaine Carillon à Puligny-Montrachet
Après un petit déjeuner au bar-tabac du centre et une douche matinale prise bien malgré nous dans les rues de Meursault, nous repartons vers Puligny
pour notre traditionnelle visite au domaine Carillon.
Au bout de 30 années d’existence la SC Louis Carillon et fils va se diviser en 2 domaines distincts : les 2 frères, François et Jacques, ont choisi
d’un commun accord de partager leur patrimoine pour travailler chacun sous sa propre identité à partir du millésime 2010.
Après deux décennies de rencontres avec l’aîné de la famille Carillon, c’est François, le cadet, qui nous attend aujourd’hui sur la place de l’Eglise
pour nous guider vers son chai à barriques et nous proposer un petit tour d’horizon gustatif de sa production.
Une belle cave voûtée au centre de Puligny : bienvenue au domaine François Carillon
Nous commençons la dégustation par quelques cuvées 2009 encore en barriques :
Bourgogne blanc : le nez est très fringant sur un registre fruité (fruits blancs), la bouche
est élégante et profondément marquée par une minéralité puissante.
Issue d’une parcelles de vieilles vignes cette cuvée exprime déjà pleinement le terroir de Puligny : un vin d’entrée de gamme
avec un très haut niveau qualitatif et un excellent rapport Q/P.
Puligny Villages : le nez est charmeur, très ouvert, agréablement fruité et discrètement
vanillé, la bouche est opulente avec du gras et une belle finale minérale.
Issu d’une parcelle située sous les Enseignères (les Noyers Bret pour les connaisseurs…), ce vin a une matière riche et équilibrée
qui séduit immédiatement mais qui a des ressources certaines pour la garde.
1° Cru Les Folatrières : le nez est discret et pur sur les agrumes et les fleurs blanches, la
bouche est vive, parfaitement équilibrée, la longue finale révèle de belles notes épicées (poivre blanc).
Un très beau premier cru qui fera partie de la gamme du domaine François Carillon en compagnie des Perrières, Referts, Champ Gain
et Combettes…et qui permettra une variante dans mes réservations habituelles.
La dégustation se poursuit avec quelques références sur 2008 en bouteilles :
Puligny Villages : le nez est très agréable avec des notes de zestes d’agrumes et de fines
nuances vanillées, la bouche est très droite, la matière est puissante, la finale est bien minérale et délicatement citronnée.
Un « villages » qui se hisse à un très haut niveau qualitatif…et à 22 euros, le rapport Q/P commence à devenir ultra
intéressant. Au moment où le domaine restructure sa clientèle, c’est vraiment le moment de tenter sa chance !
1° Cru Les Champs Canet : le nez délicat et très élégant développe des notes de beurre et de
noisette et de craie, la bouche est soyeuse, grasse et terriblement bien balancée, la finale longue et fraîche nous offre un joli retour sur son caractère minéral (craie).
Tendre et très ouvert dans sa prime jeunesse, ce vin déjà très flatteur possède une structure magnifique qui fait honneur à la
noblesse de son origine
1° Cru Les Perrières : le nez est profond et minéral avec des notes de craie et de menthe
fraîche, la bouche est droite, solidement charpentée et dotée d’une finale longue marquée par des évocations pierreuses et des arômes de citron frais.
Ce terroir est l’un des plus pierreux des crus de Puligny, mais comme nous l’explique François Carillon « le sol est bien
drainé mais la vigne profite d’ un apport hydrique venant du sol grâce à l’infiltration des eaux d’un petit étang en contre-haut ». En tous cas ce vin est un archétype de pureté et de
concentration prêt à défier le temps.
Les vins des deux derniers millésimes estampillés Louis Carillon et fils tiennent leur rang et leurs promesses : la
densité de ces jus purs et puissamment minéraux me parlera toujours…
Connaissant l’implication des deux frères dans ce domaine familial, je n’ai aucun doute sur l’avenir : le nom de
Carillon sera toujours un gage d’excellence dans le vignoble de Puligny !
François a déjà commencé à faire fructifier son patrimoine en enrichissant sa gamme avec des premiers crus sur Chassagne
notamment, en attendant de trouver quelques ouvrées sur un grand cru pour remplacer le Bienvenues-Bâtard qu’il a laissé à son grand frère Jacques : « il n’était pas question de diviser
cette parcelle qui compte sept rangs de vigne ».
Suite à l’invitation de François Carillon, je repasserai sûrement au domaine avant le fin de l’année pour un tour complet
de sa production sur 2009 et éventuellement quelques premières impressions sur le nouveau millésime. Pour tout vous dire, j’ai hâte d’y être…
Domaine Buisson-Charles à Meursault
Quatrième passage au domaine Buisson-Charles et toujours pas de Patrick en vue… là c’est sûr, le boss de DC me fuit !!!
Ceci dit, il s’en sera fallu de peu cette année, puisque à l’heure où je me présente rue de la Velle à Meursault, Patrick et son épouse viennent de
partir pour un petit séjour de quelques jours au bord de la grande bleue, histoire de récupérer de leur tournée outre-atlantique (bon d’accord, je dramatise un peu, on s’est quand même croisé
deux fois au cours de l’année écoulée…).
Nous retrouvons donc avec grand plaisir Michel Buisson qui nous reçoit comme à son habitude avec beaucoup d’amabilité : un vigneron cordial et très
disponible qui sait se faire fin pédagogue lorsqu’il s’agit de nous aider à comprendre ses vins.
Sans tarder il nous invite à le suivre dans la cave pour partir une nouvelle fois à la découverte de la production du domaine.
Dans la cave du domaine Buisson-Charles, le sourire réjoui de Martial en dit long…
Quelques bouteilles pour commencer :
Aligoté 2008 : le nez est très gourmand sur la poire et le miel, la bouche est agréable avec
un bel équilibre entre la rondeur et la fraîcheur.
Un vin plaisir mais toujours un super niveau qualitatif. Bravo !
Meursault Vieilles Vignes 2008 : le nez est ouvert et charmeur sur le miel et la
noisette, la bouche est équilibrée avec un gras assez opulent et une longue finale sur la craie et la noisette.
Meursault Vieilles Vignes 2007 : le nez est discret mais profond, le registre est
très minéral, la bouche est concentrée mais la structure reste très droite, la minéralité revient longuement en finale avec de fines notes crayeuses.
Le 2008 bien équilibré et déjà très flatteur, le 2007 déjà profondément marqué par le terroir, ces « villages », très
justement encensés par « Marianne » ont vraiment beaucoup de classe !
Meursault Tessons 2007 : le nez est expressif et associe des notes grillées et
fruitées (agrumes frais), la bouche est fraîche et savoureuse (beurre frais, vanille), la finale est longue et minérale.
Meursault Tessons 2008 : le nez est tout aussi expressif, sur le fruit mais un peu
moins de rôti, la bouche est opulente avec du gras et une belle acidité, la longueur aromatique finale est impressionnante.
Un 2007 très élégant avec une structure ample et bien équilibrée, un 2008 au registre aromatique très proche mais avec une
profondeur aromatique plus grande… mais ne chipotons pas, les 2 s’expriment avec brio et se dégustent avec grand plaisir.
Meursault 1° Cru Bouches Chères 2008 : le nez est plein de mystère, pur mais très
réservé, la bouche est somptueuse, puissance, volume et équilibre parfait, le tout agrémenté par un développement aromatique long et complexe sur le citron frais, le miel et les épices
douces.
Un vin à l’expression olfactive plein de retenue mais avec une présence en bouche vraiment exceptionnelle.
Magnifique !
La dégustation se poursuit avec les vins de 2009 en barriques :
Meursault Vieilles Vignes 1 : le nez est charmeur avec un fruité expressif et un
léger vanillé, la bouche est riche et onctueuse, la finale est bien longue.
Meursault Vieilles Vignes 2 : le nez est plus discret avec quelques notes de fruits
blancs, la bouche est droite, profonde avec une grande longueur sur la minéralité en finale.
Prélevés sur 2 barriques d’origine différente (Chêne du Tronçais pour le 1 et chêne des Vosges pour le 2, je crois…) ces jus sont
splendides d’équilibre et de concentration, même si leur profil est bien différencié à l’heure actuelle. Pour nous donner une petite idée sur la personnalité de la future cuvée 2009, Michel
Buisson réalise un assemblage à la pipette et nous le soumet…MIAMMMM !
Meursault Tessons : un nez est perturbé par des notes de réduction assez tenaces, la
bouche révèle une matière élégante, un équilibre tout en finesse et une finale très riche.
Peu à son avantage au niveau aromatique ce vin a une présence en bouche remarquable. Confiance, il sera grand !
Meursault 1° Cru Les Cras : le nez est profondément minéral, la bouche est très
onctueuse avec un joli gras et une finale longue et très riche.
Assez pierreux au nez mais très caressant en bouche : un dialogue intéressant entre le terroir et le
millésime…
Meursault 1° Cru Charmes : le nez s’ouvre sur des notes de silex et de poudre à
canon, un fruité riche et une petite touche vanillée se révèlent progressivement, en bouche la matière est onctueuse et flatte le palais, la finale est très longue.
De la soie en bouche…quel régal !
Meursault 1° Cru Goutte d’Or : le nez est un peu austère avec une palette aromatique
sur la minéralité et un léger fumé, la bouche est droite, solidement charpentée mais la matière reste riche et généreuse.
Un vrai changement de registre par rapport au vin précédent…on passe quasiment du féminin au masculin, mais on reste sans conteste
dans l’aristocratie bourguignonne.
Meursault 1° Cru Bouches Chères : le nez est fin et délicat sur les fruits secs
(noisette, amande), la bouche allie un gras très gourmand, une acidité très droite et une minéralité qui se prolonge très longuement en finale.
Une forme de synthèse entre la virilité de Goutte d’Or et la féminité de Charmes, peut-être…un très grand vin
sûrement !
Après un feu d’artifice en blanc, nous terminons cette longue série par les crus rouges 2009 du domaine :
Bourgogne : le nez est ouvert et riche, cerise noire et noyau (un peu kirsch), la bouche est
dense avec une trame tannique souple et une très belle présence en finale.
Un 2009 bien typé sur le fruit, très gourmand en bouche… comme pour chaque millésime, ce « générique » fait honneur à
son appellation.
Pommard 1 : le nez un peu réduit au début exprime progressivement de fins arômes de terre
humide et de fumée, la bouche est onctueuse avec des tanins fins, serrés mais bien enrobés.
Pommard 2 : le nez est plus ouvert et marqué par un fruité très pur, la bouche possède une
structure pleine de charme tout en rondeur et en longueur.
Ce cru testé sur 2 fûts d’origine différente (chêne du Tronçais pour le 1 et des Vosges pour le 2…là je suis sûr !), nous
montre l’influence non négligeable du contenant sur un vin, tant au niveau du registre aromatique que sur la structure.
Ceci dit, les 2 jus sont parfaits et l’assemblage va sûrement nous livrer un Pommard de toute beauté.
Volnay 1° Cru Santenots 1 : le nez est intense avec des arômes de cerise noire, la
bouche est charnue et soyeuse, un joli gras enveloppe des tanins bien mûrs, la finale est très longue.
Volnay 1° Cru Santenots 2 : le nez se montre plus réservé, la bouche est un peu plus
austère avec des tanins plus fermes, la longue finale est marquée par une petite touche acidulée très fraîche.
L’ordre des échantillons prélevés est inversé (Vosges pour le 1 et Tronçais pour le 2) mais les conclusions sont identiques… du
grand Santenots en perspective pour 2009 !
Encore un beau moment passé en compagnie de ce vigneron authentique et sympathique qui nous offre chaque année une bien
jolie promenade à travers les terroirs de Meursault…on ne s’en lasse pas !
Des vins d’entrée de gamme jusqu’aux magnifiques premiers crus, ce domaine propose des cuvées d’une qualité vraiment
irréprochable…avec des 2009 qui se présentent de la plus belle manière qui soit.
A ne pas rater bien sûr !
Cette année l’enchaînement Carillon-Buisson dans la même demi-journée a été particulièrement édifiant pour comprendre la
spécificité de ces terroirs géographiquement si proches et gustativement si différents : rigueur minérale sur Puligny, densité pleine de soie et de saveur sur
Meursault.
Ne me demandez pas où va ma préférence : les deux me sont devenus indispensables !
Une belle triplette du domaine Buisson-Charles
Domaine Rollin à Pernand Vergelesses
Pour la dernière étape avant notre retour en Alsace nous nous rendons au pied de la majestueuse colline des Cortons pour une visite au domaine Rollin à
Pernand Vergelesses, un village pittoresque et accueillant comme je les aime.
Dans certains cas le terme de pèlerinage prend vraiment tout son sens car c’est dans les caves de ce domaine où, il y a bien longtemps (plus d’un quart
de siècle !), j’ai fait ma première visite dans le vignoble bourguignon : rencontre mémorable et naissance d’une addiction définitive aux vins et aux vignerons de cette
région !
Aujourd’hui ce domaine familial de 12 hectares est géré par Rémi Rollin et son fils Simon, qui a rejoint l’exploitation en
2003.
C’est l’épouse de Simon qui nous accueille et nous propose une rapide visite de cave (à vrai dire nous sommes un peu pressés par le temps) ainsi qu’une
découverte gustative de la production du domaine Rollin.
Moderne et accueillant, la caveau de dégustation du domaine Rollin.
Nous commençons par la dégustation de la gamme de vins blancs 2008.
Pernand Vergelesses : le nez est fin et guilleret avec un fruité bien net, la bouche est
agréable avec équilibre tendu et une belle minéralité en finale.
Un vin plein de vivacité qui se livre déjà avec beaucoup de gourmandise, mais qui n’a sûrement pas dit son dernier
mot.
Pernand Vergelesses Les Cloux : le nez est discret, le fruit est très pur, la bouche
possède un joli gras et un volume appréciable, la finale est tendue et longue.
Un vin issu d’une parcelle de jeunes vignes que les Rollin ont choisi de vinifier à part : la présence en bouche est
remarquable…sûrement une très belle cuvée en perspective !
Pernand Vergelesses 1°Cru Sous Frétille : le nez est fermé, un peu serré mais la
bouche nous offre une structure sphérique et une finale pleine de volume et de longueur.
Un peu timide sur le plan olfactif, ce premier cru qui tient son rang par sa grande ampleur en bouche.
Corton Charlemagne : le nez est très réservé sur le pain grillé, le citron frais, la bouche
est grasse et charnue, la structure est très ample et la finale très longue laisse apparaître de délicates notes de noisette.
Issu d’un assemblage de raisins provenant de 2 parcelles classées, l’une sur « Le Charlemagne » orientée au sud, l’autre
sur « En Charlemagne » orientée sud-ouest, ce grand cru signe sa noble origine en alliant puissance, complexité et une très longue persistance aromatique
Le chai à vins blancs du domaine Rollin.
Nous passons aux vins rouges, des cuvées toutes issues du millésime 2007.
Pernand Vergelesses : le nez est ouvert et expressif, la cerise est très présente, la bouche
est riche et concentrée avec une trame tannique souple et gourmande, la finale révèle de belles nuances minérales.
Mûr, flatteur mais superbement équilibré…un très beau vin avec un rapport Q/P étourdissant (moins de 10 euros). A ne pas
rater !
Pernand Vergelesses 1°Cru Les Vergelesses : le nez est franc et très précis sur les fruits
rouges, la bouche possède une matière mûre mais garde une structure bien carrée, la finale est longue.
Une présence en bouche plus solide et plus complexe nous fait passer dans la gamme des terroirs classés : un beau vin solide
mais très agréable.
Pernand Vergelesses 1°Cru Les Fichots : le nez est discret et complexe sur le sous-bois et les
petits fruits noirs, la bouche est massive et charnue avec un gras flatteur et une belle finale minérale.
Le marquage minéral du terroir commence à s’affirmer sur une matière bien mûre : à garder un peu mais déjà fort agréable à
boire.
Pernand Vergelesses 1°Cru Ile des Vergelesses : le nez est très élégant, la palette complexe
révèle de belles notes florales, la bouche est d’un abord très agréable, ample, soyeuse et finement tannique, la finale est très longue.
Le terroir de l’Ile des Vergelesses est le plus réputé de Pernand…ce vin généreux, complet et déjà parfaitement ouvert justifie
pleinement son rang.
Aloxe Corton : le nez est riche et complexe sur les fruits noirs et quelques nuances fumées,
la bouche est solidement charpentée, la structure est encore un peu anguleuse mais la finale longue et équilibrée est pleine de belles promesses.
Un vin gaillard, un peu rustaud mais plein de ressources qui aura besoin d’un peu de temps pour s’harmoniser.
La gamme du domaine Rollin : homogène et très complète.
J’aime bien finir mon séjour bourguignon par une belle découverte : ce domaine correspond parfaitement à mon vœu.
L’accueil est simple mais généreux, les vins sont terriblement bien faits : le Pernand les Cloux promet, le Corton Charlemagne est grand et les rouges très gourmands mais bien structurés
sont armés pour se bonifier quelques années en cave…En plus le rapport Q/P de ces vins est excellent.
D’accord, ça fera une adresse de plus dans mon carnet…mais bon, je sens que mon pèlerinage annuel va passer à un rythme
semestriel dans pas longtemps !
Ma vieille collection d’étiquettes (du temps où elles se décollaient…) me rappelle parfois la dure réalité du temps qui
passe !!!
N' oubliez pas de découvrir le Pélerinage en Bourgogne 2010 - Jour 1