Pour cette quatrième réunion de l’année 2011 du club AOC nous avons choisi d’associer les 2 thèmes
suivants :
- Thème 1 : à la découverte des rieslings du Rheingau.
- Thème 2 : Margaux à travers quelques grands crus.
L’association d’un thème classique et d’un thème découverte commence à rentrer dans les mœurs au sein de notre petit club :
ce soir ce sont les rieslings du Rheingau qui constitueront la partie « ouverture culturelle » de notre dégustation. Dans cette perspective, François, notre globe-trotter local, a
composé une série de bouteilles pour nous initier à cette autre vision de ce cépage.
Rapporter en terre alsacienne, 6 flacons pour contester la suprématie du riesling local…audace ou
inconscience ?
La série de Margaux regroupe 6 belles références de cette région, une courte série qui, avec 3 vins jeunes et 3 vins plus évolués,
se propose de nous emmener dans l’univers luxueux de cette appellation dont la seule évocation du nom véhicule rêves et fantasmes…illusion ou réalité ?
Deux questions auxquelles le groupe ne manquera pas d’apporter ses réponses…le verre à la main comme
d’habitude.
Les vins sont servis bouteilles sous chaussettes et 2 par 2. Les vins de la première série sont ouverts au moment du service ceux de la deuxième ont été débouchées
plusieurs heures avant la dégustation.
Verres INAO.
Soirée Club AOC du 8 avril 2011 à La Wantzenau
Thème 1 : il y aurait des rieslings ailleurs qu’en Alsace !
Riesling Kabinett Halbtrocken 2008 – Weingut Robert Weil à Kiedrich/Rheingau : le nez est
discret, citronné et un peu « pierreux », la bouche est élégante avec un fruité simple mais plaisant et une finale légère et courte.
Provenant d’un grand domaine qui appartient à une compagnie japonaise et dont une grosse partie de la production part à l’export
(Etats Unis et Japon notamment), ce riesling propre, un peu basique mais bien travaillé se déguste avec facilité et plaisir…ça commence plutôt bien !
Bacharacher Riesling Hahnenhof Kabinett Trocken 2008 – Weingut Toni Jost à
Bacharach : le nez est très fin avec de délicates nuances florales (acacia), la saveur acidulée et le léger perlant confèrent une belle vivacité à la présence en bouche, la
finale laisse apparaître une impression de volume et de profondeur pleine de promesses.
Issu de la région du Mittel-Rhein, sur un terroir de schistes avec des pentes avoisinant les 60%, ce riesling moins expansif que
le précédent se distingue par une structure plus élaborée et plus complexe…au niveau de la classification on reste en entrée de gamme « Kabinett » mais dans le verre on monte vraiment
d’un cran !
Riesling Spätlese Trocken 2009 – Schloss Vollrads à Oestrich-Winkel : le nez est riche et
expressif, à la fois exotique (mangue, citron vert) et finement épicé (cardamome) le toucher de bouche est avenant avec un gras très gourmand et une finale acidulée de longueur
moyenne.
Cette cuvée « Spätlese » plus mûre (10 SR – 7,6 AT – 13°) que les deux précédentes garde un très bel équilibre sec tout
en se livrant avec beaucoup de gourmandise…miam !
Riesling Winkeler Jesuitengarten Spätlese Trocken 2008 – Weingut Johannishof à
Johannisberg : d’abord surprenant avec des notes fumées assez prononcées, le nez se développe sur un registre plus classique, écorces d’agrumes et nuances minérales, la bouche est
large avec un fond solidement charpenté et une finale complexe, tour à tour acidulée, finement amère et légèrement tannique.
Ce riesling plus sec (5 SR – 7,4 AT – 11°5) évolue dans un registre très classique mais parfaitement maîtrisé. Une cuvée
surprenante d’équilibre et de force.
Riesling Hölle Kabinett Trocken 2008 – Weingut Kunstler à Hoehheim : le nez est
discret mais très pur avec de fines notes florales et minérales, la bouche est droite et précise, la minéralité longue et profonde apparaît dès l’attaque et tend la structure jusqu’en finale où
une petite pointe camphrée se manifeste.
Ciselé avec finesse mais plein d’énergie, ce riesling est vraiment d’ « enfer » ! (pour ceux qui auraient quelques
lacunes en allemand, « Hölle » se traduit par « enfer »).
Riesling G.C. Wiebelsberg 2006 – Domaine Rieffel à Mittelbergheim : le nez est très
fin avec des notes de groseille blanche, de fleurs et des évocations minérales très pures, l’attaque en bouche est très ronde, la palette aromatique s’épanouit sur les agrumes confits et quelques
nuances d’épices, la structure est bien large et puissamment minérale.
Le pirate a tombé son masque au premier coup de nez : la signature du grès du Wiebelsberg est vraiment très explicite. Ce
riesling très opulent a dénoté dans cette série où les équilibres des différentes cuvées étaient bien plus secs, il n’en reste pas moins un bel exemple d’expressivité
minérale.
Riesling Lorcher Burgweg Spätlese Trocken 2008 – Weingut Greulich à Huttenheim : le nez
est délicat et particulièrement raffiné sur le citron confit, la citronnelle, la bouche est très sphérique avec un joli gras, une palette gourmande et une longue finale fraîche et
minérale.
Des vieilles vignes (43 à 73 ans) sur des parcelles pentues de schistes et de limons ont produit quelques flacons de ce magnifique
riesling (rendement 30hl/ha). Ce petit domaine qui commercialise 2500 bouteilles par an et qui pratique une viticulture très exigeante nous donne une parfaite image du potentiel de ces terroirs
rhénans…pour moi le vin le plus abouti de la série !
La série de riesling du Rheingau avec l’intrus alsacien.
Pour conclure :
- Suite à première soirée consacrée à des vins d’outre-Rhin avec les blancs de la Mosel, je m’attendais à goûter une série
de cuvées où acidité puissante et sucrosité cohabitent sans trop d’harmonie...mais il n’en fut rien ! Ces rieslings allemands provenant de quelques domaines en vue du Rheingau m’ont vraiment
étonné par leur constitution : équilibre, gourmandise et tenue en bouche dignes des meilleures références de notre région ont largement séduit l’assemblée des dégustateurs de ce soir.
Bravo !
- Le vignoble du Rheingau borde le Rhin sur des coteaux pentus avec un sol principalement constitué de schistes et de
limons et les meilleures parcelles sont orientées plein sud. Les grands domaines ont entrepris une démarche qualitative avec une viticulture qui leur permet d’obtenir une maturité optimale des
raisins et des méthodes de vinification les plus naturelles possibles en interdisant notamment toute chaptalisation. Cette série très homogène nous a donné une belle image de la production de cet
autre vignoble où le riesling règne en maître…l’alsacien est chauvin, certes, mais face à de telles bouteilles il s’incline et se lèche les babines.
S’il fallait mettre un bémol, ce serait le prix relativement élevé de ces vins : 12 à 15 euros pour les bons
« Kabinett » et plus pour les « Spätlese » ça peut quand même faire réfléchir quand on habite en Alsace…
- Pour ce qui est du coup de cœur personnel aucune hésitation : le dernier vin de la série, le riesling Lorcher Burgweg
Spätlese Trocken 2008 est un très grand vin…et le fond de bouteille dégusté le lendemain n’a fait que confirmer l’impression de la veille. En plus, à 13 euros la bouteille, même le prix est
TOP…un must absolu !
Thème 2 : Margaux…une petite série de grands rouges.
Château d’Issan 2008 : le nez est délicat et très élégant, mûre, cassis et léger vanillé, la
bouche est charnue et soyeuse avec une trame tannique mûre et racée et une jolie finale à qui une fine acidité donne une fraîcheur bien agréable.
Belle matière, élevage intégré et texture très raffinée en bouche…ce vin jeune charme par sa buvabilité et sa gourmandise. Jolie
entrée en matière
Château Cantenac Brown 2008 : le nez est très empyreumatique, fumée, café moulu et pain
grillé, en bouche la matière est très généreuse avec des tannins bien présents, la finale n’est pas encore en place, on y sent une légère amertume et un peu de chaleur.
Un vin dans un style très démonstratif, vraiment marqué par l’élevage… encore trop jeune pour être apprécié ou simplement trop
boisé à la base ? La question se pose vraiment.
Château Rauzan Gassies 2008 : le nez est très fin avec un fruité subtil, de belles notes
cacaotées et épicées et une pointe de réglisse, la bouche est corsée mais joliment équilibrée, il y a de l’amplitude et de la profondeur, la trame tannique est fine et la finale laisse une marque
aromatique très persistante.
Ce Margaux flatte le nez et le palais par sa matière riche et complexe tout en conservant une élégance très distinguée…une jolie
réussite !
Château Bel Air Marquis d’Aligre 2000 : le nez est peu agréable, évolué, tertiaire avec des
nuances de jus de viande, de genièvre mais également des notes moins flatteuses (un peu chaussette de randonneur…), la bouche est fluette, décharnée et la finale sèche très rapidement.
Un Grand Cru Classé issu d’un grand millésime, mort au bout de 10 petites années…il y a de quoi se poser des
questions !
Château Prieuré Lichine 2002 : le nez est élégant et charmeur sur les fruits noirs, la
réglisse, les épices douces, la bouche est splendide, ample et sphérique, tenue par une trame tannique solide mais soyeuse, la finale est longue et d’une fraîcheur très gourmande.
Un vin qui se présente à nous sans trop d’esbroufe mais avec une personnalité séduisante et bien épanouie pour laquelle on ne peut
que craquer…Superbe !
Château Margaux 1993 : le nez est discret et peu flatteur sur du poivron frais et quelques
notes rappelant la craie ou la poussière, la violette se manifeste après une longue aération, la bouche possède une trame tannique serrée et fine mais l’ensemble manque de volume, malgré quelques
notes légèrement réglissée la finale déçoit en laissant une impression de sècheresse.
Que dire ??????????????????????????????????????????????????????????
Un mythe qu’une dégustation à l’aveugle a placé à un niveau indigne…hélas mérité !
Quand je vois le prix d’un tel flacon sur le net, je me pose vraiment des questions…
Il me reste un exemplaire en cave que je garderai pour mon fils (c’est son millésime), il en fera ce qu’il voudra. Peut-être que
dans quelques années, il se produira un miracle…mais l’espoir est maigre !
La petite série de grands Margaux
Pour conclure :
- Voilà une série bien hétérogène avec des bouteilles supposées de bon niveau (25 à 45 euros…sans compter le Margaux) mais
qui ne laissera pas un souvenir impérissable dans l’historique du club.
Une très bonne surprise, deux vins prometteurs, un cru qui manque d’élégance et deux bouteilles indignes de leur rang…pas
terrible pour cette appellation qui fait rêver la planète oenophile !
- Château Margaux fut un choc : dégusté une première fois il y a trois ans, ce 93 n’avait rien de transcendant mais
se présentait comme une très beau vin. Rien à voir avec le vin dégusté ce soir…
Avec cette déconvenue se repose, entre autres, la question de la dégustation à l’aveugle pour les flacons
mythiques.
En effet, je pense que ce type de vin gagne à être consommé avec l’état d’esprit d’un « buveur
d’étiquette » : sans l’aspect symbolique on perd certainement une des dimensions essentielles de l’acte en occultant les rêves et les fantasmes liés à ces crus mythiques…et au prix de
la chose c’est vraiment dommage !
- Pour le coup de cœur personnel le choix de Prieuré Lichine 2002 est évident : mûr, gourmand, avec une trame
tannique finement ciselée…conforme à cette image de distinction et d’élégance des crus de Margaux.
De plus, c’est un des vins les moins chers de la série…Chapeau !